L’Autoportrait mythique de Gabrielle Roy. Analyse genettienne de La Montagne secrète de Gabrielle Roy
Titre | L’Autoportrait mythique de Gabrielle Roy. Analyse genettienne de La Montagne secrète de Gabrielle Roy |
Type de publication | Livre |
Année de publication | 1994 |
Auteur·e·s | Mallette, Y |
Ville | Orleans |
Éditeur | Éditions David |
Texte complet | Lecture narratologique qui a pour but de faire «la preuve scientifique de ce que La Montagne secrète est un authentique roman» (p. 16). À propos du temps romanesque, on remarque d’importantes variantes dans la vitesse d’évolution du récit au sein de chacune des trois parties du roman et de l’une à l’autre. Des quatre mouvements narratifs répertoriés par Genette, l’ellipse, bien que fréquente, modifie peu la vitesse diégétique; la pause descriptive ne survient qu’à deux reprises, fait étonnant puisqu’il s’agit de la narration de la vie d’un artiste visuel. En fait, presque toutes les descriptions sont focalisées par un personnage (Gédéon, Pierre…) et sont intégrées ainsi au cheminement artistique de ce dernier. Les sommaires, plus fréquents, servent à accélérer le déroulement, à préciser encore l’évolution de Pierre, et à assurer la transition entre les scènes dramatiques. Le rythme du roman vient pour l’essentiel de l’alternance sommaire-scène et surtout d’«un mouvement constant, ou plutôt un déchirement, entre la scène objective et la scène subjective correspondant au déchirement entre le “vivre” et le “raconter”» (p. 265). Les prolepses (anticipations) sont rares, alors que les analepses (retours en arrière) abondent et éclairent surtout les épreuves qu’a traversées Pierre et son long cheminement vers la réalisation de son rêve de devenir artiste. L’itération, dans les deux premières parties du roman, rappelle également les difficultés que connaît Pierre et la force de sa volonté en plus d’éclairer différents aspects de la vocation artistique. Quant au mode, le récit diégétique (d’événements) met en lumière l’importance de l’expérience visuelle pour l’artiste, tandis que le récit mimétique (de paroles), qui prend la relève dans la dernière partie du roman, souligne le rôle que joue la réflexion. La distance narrative qu’implique le déchirement entre le «vivre» et le «raconter» vient en partie d’une prédominance du discours transposé par rapport au discours rapporté. Enfin, l’étude de la voix narrative montre l’importance du narrateur extradiégétique qui «raconte l’histoire comme s’il en avait été témoin ou, mieux encore, comme s’il l’avait lui-même vécue» (p. 240); de cette façon, le cheminement de l’artiste peintre intéresse le narrataire, qui se sent interpellé. Ce narrateur confère une dimension universelle à la réflexion sur la création artistique; l’ouverture de la fin du roman et son atemporalité soulignent encore cet effet d’universalité. Fait étrange toutefois, plus le récit avance, plus le narrateur cherche à s’éloigner de son statut hétérodiégétique, peut-être à cause de la nécessité de préciser certains aspects liés à la nature même de l’art. Le texte devient ainsi une sorte d’autobiographie à la troisième personne. [source: Saint-Martin, L. (1998). Lectures contemporaines de Gabrielle Roy: bibliographie analytique de la critique (1978-1997), Montréal, Boréal.] |