The Limits of Sympathy: Gabrielle Roy’s The Tin Flute
Titre | The Limits of Sympathy: Gabrielle Roy’s The Tin Flute |
Type de publication | Livre |
Année de publication | 1993 |
Auteur·e·s | Coleman, P |
Titre de la collection | Canadian Fiction Studies |
Ville | Toronto |
Éditeur | ECW Press |
Series Volume | 26 |
ISBN | 9781550221350 |
Texte complet | La nouveauté de Bonheur d’occasion repose sur plusieurs éléments: place importante faite aux personnages féminins, rupture d’avec la mentalité coloniale de l’époque, alliance de rigueur et de poésie. Tout au long du roman, l’auteure accorde moins d’importance au réalisme photographique qu’à une «interrogation morale et psychologique à propos de la manière dont la fiction doit (ou ne doit pas) s’approprier le réel» (p. 50). On constate notamment une tension entre «une esthétique de l’acceptation et de la résignation et la tradition réaliste marquée par des désirs agressifs de la part des personnages mais aussi de l’instance narrative» (p. 54). Le rapport de l’auteure à ses personnages se compose à la fois d’identification et de détachement, si bien que les tiraillements de l’acte créateur deviennent le grand sujet du roman. Ainsi, la relation Jean-Florentine montre que, pour Gabrielle Roy, le véritable tabou est non pas la sexualité, mais la rupture d’avec la famille: «Écrire un livre où transparaissent la sympathie et la solidarité sociale permet de justifier, et de compenser, l’autonomie qu’elle s’est arrogée par la seule force de sa volonté» (p. 67). La relation mère-enfant permet d’aborder les mêmes questions de proximité et d’autonomie; Rose-Anna est moins un personnage qu’un «espace où se résolvent les sentiments de séparation et d’intimité d’autrui» (p. 78). Malgré sa noblesse de caractère, Emmanuel refuse de remettre en cause le système, de sorte que sa vision du politique tourne court, faute de solutions concrètes; en revanche, il présente un idéal de l’amitié véritable qui offre des chances de bonheur plus solides que l’amour romantique ou l’accumulation de biens matériels. La fin du roman, avec la disparition de Jean et d’Emmanuel et l’accouchement de Rose-Anna, signale la disparition des enjeux sociaux au profit des rythmes naturels cycliques. À la fois modeste (caractère effacé de l’instance narrative, composition simple et soignée) et ambitieux (car il se donne non seulement pour un portrait détaillé et fidèle d’un quartier et de ses habitants, mais aussi pour une réflexion sur la condition humaine en général), le roman déçoit quelque peu, faute d’innovation formelle et de solutions aux problèmes sociaux. Néanmoins, grâce à l’analyse des «implications morales et artistiques de la sympathie» (p. 22) ainsi que des problèmes de séparation et de solidarité qui marquaient la société canadienne-française de l’époque, grâce aussi à ses réflexions sur la manière même dont la fiction transpose et transforme le réel, Bonheur d’occasion demeure d’une grande actualité. L’analyse du roman s’accompagne d’une présentation de sa réception critique et d’une introduction qui le situe dans le contexte social et littéraire de l’époque. [source: Saint-Martin, L. (1998). Lectures contemporaines de Gabrielle Roy: bibliographie analytique de la critique (1978-1997), Montréal, Boréal.] |