Passion et Désenchantement. Une étude sémiotique de l’amour et des couples dans l’œuvre de Gabrielle Roy
Titre | Passion et Désenchantement. Une étude sémiotique de l’amour et des couples dans l’œuvre de Gabrielle Roy |
Type de publication | Livre |
Année de publication | 1993 |
Auteur·e·s | Daviau, P |
Ville | Montréal |
Éditeur | Fides |
Number of Pages | 198 |
ISBN | 2762116813 |
Texte complet | Une approche sémiotique permet d’éclairer autrement les portraits de couples que renferme l’œuvre de Gabrielle Roy. Le portrait physique véhicule les traits psychologiques et affectifs des personnages: dureté et volonté de séduction chez Jean, douceur et droiture chez Emmanuel, alternance des deux séries de traits dans le cas de Florentine. Dans la description des couples, certaines parties du corps, notamment le visage et les mains, font l’objet d’une attention particulière de la part de Roy; elles prennent ainsi valeur de symboles. Par ailleurs, ces portraits sont construits sur des oppositions; généralement, les sèmes positifs se regroupent chez un des partenaires mariés et les sèmes négatifs chez l’autre, mais sans distinction de sexe, Rose-Anna, par exemple, possédant les mêmes traits dysphoriques que le père de Christine dans Rue Deschambault. Le carré sémiotique de Greimas permet d’examiner l’évolution de l’idéologie qui sous-tend les portraits de couples. Ainsi, les couples des premières nouvelles et des premiers romans correspondent à une conception traditionnelle de la vie conjugale, marqué par la non-communication et la soumission. Puis viennent les couples qui s’inscrivent sous le signe de l’incommunicabilité et de l’aliénation (Alexandre-Eugénie, Martha-Stépan), dont certains, y compris Martha et Stépan, évoluent à la fin vers la non-incommunicabilité et la contestation. Enfin, les deux derniers couples dans l’œuvre de Roy (Médéric et l’institutrice et, dans l’autobiographie, Gabrielle et Stephen) se situent au pôle le plus positif de communication et de libération, mais doivent se séparer. Ce n’est donc qu’en refusant la vie commune qu’on parvient à vivre une relation amoureuse positive. On peut y voir une évolution du couple vers un certain refus des valeurs traditionnelles du mariage, évolution qui trouve sa réplique dans les formes romanesques, car, à mesure que les relations se transforment, on passe du roman urbain au roman psychologique, de la focalisation zéro à la focalisation interne, puis à l’autobiographie; d’extérieurs, les portraits deviennent intérieurs et subjectifs. Toutefois, si on assiste, chez Gabrielle Roy, à une «modification des clichés culturels et de l’entité couple telle que véhiculée au Québec dans les années 1950» (p. 76), cette ébauche de contestation sociale est vite abandonnée en faveur d’une perspective individualiste selon laquelle «la réalisation du devenir personnel et professionnel des personnages l’emporte sur la perspective d’une vie à deux conventionnelle dans le mariage» (p. 136). [source: Saint-Martin, L. (1998). Lectures contemporaines de Gabrielle Roy: bibliographie analytique de la critique (1978-1997), Montréal, Boréal.] |