The Play of Language and Spectacle: A Structural Reading of Selected Texts by Gabrielle Roy
Titre | The Play of Language and Spectacle: A Structural Reading of Selected Texts by Gabrielle Roy |
Type de publication | Livre |
Année de publication | 1985 |
Auteur·e·s | Babby, ER |
Ville | Toronto |
Éditeur | ECW Press |
Number of Pages | 122 |
ISBN | 0920763022 |
Texte complet | De tous les romans royens, seul Bonheur d’occasion doit être considéré comme un roman réaliste traditionnel; tous les autres ouvrages mettent en scène, d’une manière ou d’une autre, les problèmes de l’expression et de la signification. C’est que tous les écrits de Gabrielle Roy, y compris Bonheur d’occasion, portent sur l’action de regarder, sur le «spectaculaire», un système de signification qui se manifeste dans la parole aussi bien que dans les actes non verbaux. On y retrouve donc à tout moment le «langage du spectacle», dont les manifestations prennent plusieurs formes. Sur le plan thématique, La Rivière sans repos et les «Nouvelles esquimaudes» qui le précèdent portent sur la communication et ses difficultés et sur les différences de perspective qui séparent deux cultures; les motifs récurrents du cinéma et de la lecture, ainsi que la tentative que fait Elsa d’écrire une lettre, font ressortir une interaction complexe entre fiction et réalité, si bien que, en prétendant vouloir faire une distinction entre les deux, l’instance narrative en brouille irrémédiablement les contours. Sur le plan spatial, la description de l’axe vertical (vues en plongée ou en contre- plongée, très nombreuses dans La Montagne secrète) et de l’axe horizontal (étendues infinies) ainsi que la présence des fenêtres et des miroirs sont également liées au paradigme du spectacle. Sur le plan narratif enfin, le mode (changements fréquents du point de vue, incipit in medias res) et la voix (interventions du narrateur, écart temporel entre le «je» narrant et le «je» narré) créent un écart de perception entre «le personnage innocent qui voit» et «le lecteur privilégié qui sait» (p. 84). Dans Alexandre Chenevert, le roman le plus achevé de Gabrielle Roy, le «langage du spectacle» fait place au «spectacle du langage» (voir aussi Babby 1982). En plus d’être prisonnier de sa «cage» de caissier, comme on l’a souvent noté, le personnage éponyme est prisonnier de son incapacité de communiquer; l’impossibilité de mettre en mots ses réflexions constitue l’élément le plus tragique de son enfermement. De surcroît, Alexandre observe, autour de lui, nombre de signifiants vides (discours publicitaire, propagande, formules convenues); la capacité du langage comme système de signification se trouve ainsi remise en cause. L’évocation ironique du nom du héros tout à la fin du roman accentue encore le caractère circulaire et spectaculaire du récit. De manière plus générale, l’importance accordée au problème de l’expression et de la représentation souligne le rôle clé qu’a joué Gabrielle Roy dans l’émergence de «l’âge de la parole» au Québec et indique de façon éclatante sa modernité. [source: Saint-Martin, L. (1998). Lectures contemporaines de Gabrielle Roy: bibliographie analytique de la critique (1978-1997), Montréal, Boréal. ] |